Programmé pendant l’ouverture des Journées cinématographiques de Carthage, le long métrage de Nouri Bouzid sortira dans les salles tunisiennes après la fin de cette 30e session. Rassemblant une poignée de jeunes acteurs prometteurs, le film est incontestablement fort de son casting. Peut-être son seul point fort.
Dans la lignée de «Ma Nmoutech» (Millefeuille), «Les épouvantails» de Nouri Bouzid reprend les mêmes axes et reste à la surface des thématiques surconsommées, à savoir celles de la montée de l’extrémisme religieux postrévolutionnaire en Tunisie, le port du voile et du clivage laïque et islamiste, toujours aussi persistant de nos jours et forcément bien plus présent au cinéma. «Les épouvantails» de Nouri Bouzid plonge les spectateurs en 2013, année sanglante en Tunisie : le peuple tunisien a connu l’assassinat des opposants Chokri Belaid et Mohamed Brahmi et a été secoué par une vague d’attentats terroristes jusqu’en 2018. Le pays a également connu une vague de départ de plus de 6.000 jeunes Tunisiens partis rejoindre les rangs de l’Etat Islamique «Daech».
Parmi eux, de jeunes filles parties pratiquer le «Jihad sexuel».
La réalité a été retracée à l’écran en relatant le parcours de Zina et Djo revenues en Tunisie traumatisées par cette expérience vécue en Syrie : la-bas, elles ont été enfermées et séquestrées par une horde de combattants fanatiques. L’une d’elles était revenue enceinte et les deux victimes devront vivre avec des séquelles psychologiques pour le restant de leur vie. Rapatriées en Tunisie, elles sont prises sous l’aile de Nadia, une avocate, défenseuse acharnée des Droits humains, déterminée à les soutenir et à trouver leurs bourreaux. Par ailleurs, l’avocate est proche de Driss, un jeune homosexuel tunisien qu’elle a défendu auparavant quand il était victime de persécutions. Driss, joué par Mehdi Hajri, tentera d’aider l’une des deux filles rescapées à accomplir sa réinsertion sociale éprouvante; ensemble, ils tenteront de résister à une société conservatrice.
Pendant le film, une impression de «déjà-vu» a fortement plané. La redondance des récits traitant de ces sujets est rapidement devenue pesante : des histoires sont relatées mais restent creuses et fades et au fur et à mesure, le spectateur se noie dans le jargon de «l’extrémisme religieux», souvent utilisé sous l’ère de la Troika (Une Troika d’ailleurs souvent citée et pointée du doigt). Le film met également en valeur la relation entretenue par les deux jeunes personnages incarnés par Mehdi Hajri et Nour Hajri : un rapport de confiance et d’amitié s’est installé avec le temps. Le film épingle frontalement les agissements des fanatiques religieux et de leurs dirigeants, juste après le déclenchement de la révolution. Le dénouement s’est déroulé au bout de 96 mn sans surprise. Le casting 5 étoiles du film reste sans doute son point fort : Sondos Belhassen, Fatma Ben Saidane, Afef Ben Mahmoud, qui est également productrice du film, Ghanem Zrelli, Nooman Hamda et les nouvelles têtes d’affiche Nour Hajri, Joumene Limam et Mehdi Hajri. Le film a été projeté pendant l’ouverture des JCC le 26 octobre 2019 et pendant celle de la 76e édition de la Mostra de Venise pour sa première mondiale. Il a reçu le prix Spécial des Droits de l’Homme (Prix HRB) décerné dans ce même cadre. Le film sortira dans toutes les salles tunisiennes le 3 novembre 2019.